News

May 14

2019

By

||

||

1 Like

||

Print Friendly, PDF & Email

Au Cameroun de Paul Biya, la répression numérique s’accentue et inquiète

Le président camerounais Paul Biya n’est pas aussi suivi sur Twitter comme ses homologues Paul Kagamé (1, 44 millions d’abonnés) du Rwanda ou encore Nana Akufo-Addo (951k abonnés) du Ghana. Cependant les publications de plus en plus fréquentes du président camerounais et sa gestion de son compte Twitter suscitent des réactions dans la presse locale et régionale. Le quadragénaire est accusé de supprimer sous ses publications, les commentaires qui lui sont défavorables et de bloquer les activistes ainsi que les personnalités politiques qui critiquent sa gestion du pays.

Depuis plusieurs mois, Paul Biya a décidé de s’adresser à ses compatriotes via les réseaux sociaux ; ses visites officielles, ses messages de voeux…tout se fait via son compte Twitter. Le président Biya a commencé depuis quelques semaines à évoquer toujours sur cette plateforme numérique, l’actualité sociopolitique de son pays. Avec des citations inscrites sur des visuels, il aborde des thèmes comme le pardon, la liberté de manifestation ou encore le dialogue.

Ce sont ces publications qui sont diversement appréciées par une partie des internautes camerounais. Les critiques fusent régulièrement de part et d’autre. Si certains critiquent sa gouvernance économique du Cameroun, beaucoup remettent en cause sa gestion des crises anglophone et postélectorale.

Selon le site d’informations panafricain africardv.com, plusieurs de ces commentaires qui fustigent la gouvernance du président Paul Biya sont systématiquement supprimés. Les auteurs sont bloqués et ne pourront plus suivre le chef de l’État. Du haut de ses 85 ans, l’homme qui dirige le Cameroun depuis 35 ans n’accepte visiblement pas les critiques selon Africardv.

« Le leader du mouvement Stand Up For Cameroon et présidente du Cameroon Peoples Party (CPP), Kah Walla, a annoncé qu’elle avait été bloquée sur le compte Twitter de Paul Biya. De même que le blogueur Serge Mapoko et quelques rares qui ont eu le courage de l’exprimer publiquement”, a publié le journal en ligne.

Les organisations de la société civile sont montées au créneau pour dénoncer ce qu’elles qualifient de restriction de la liberté d’expression en ligne. Depuis Paris, Internet sans Frontière se montre inquiète.

“Nous sommes très inquiets que les personnalités politiques, mais également de la société civile ou même des citoyens lambdas puissent être bloqués par le compte officiel du président du Cameroun. C’est une institution et à ce titre, une institution démocratique doit pouvoir accepter que les citoyens puissent s’adresser à elle y compris des critiques” a confié Julie Owono Directrice de Internet Sans Frontière qui appuie ses propos par l’exemple américain. En effet la Cour suprême américaine avait assimilé à de la censure, le fait pour le président Donald Trump de bloquer ses opposants sur la plateforme Twitter.

Pour le journaliste et lanceur d’alerte camerounais Paul Chouta, « le fait de bloquer les activistes, blogueurs et influenceurs web critiques vis-à-vis du régime sur le compte du président Paul BIYA est une preuve de son caractère dictatorial, car bloquer des gens parce qu’ils ne partagent pas les mêmes points de vue que lui résulte tout simplement du refus de la contraction qui va aux antipodes de la démocratie ».

De son Côté, Patrice Nouma, activiste en exile aux USA relativise. Pour l’ancien officier reconverti en web-activiste, Paul Biya est libre de bloquer qui il veut sur compte Twitter. Il estime qu’une partie des commentaires souvent supprimés par le chef de l’État font plutôt « l’éloge de la sécession, de tentative de coup d’État et de dénigrement ». Néanmoins, Patrice Nouma estime qu’en sa qualité de président de la République, « il [Paul Biya] devrait accepter les critiques ».

Le Cameroun a perdu deux points au dernier classement de Reporters Sans Frontières sur la liberté d’expression. Selon l’ONG, la menace sur la liberté d’expression est permanente au Cameroun.

“Le Cameroun poursuit sa longue marche arrière en matière de liberté de la presse. Champion africain des coupures internet en 2017, le pays a de nouveau connu des perturbations de son réseau à la suite de la réélection de Paul Biya pour un septième mandat en octobre 2018”, précise RSF avant de dénoncer “les détentions arbitraires de journalistes et les poursuites, notamment devant des tribunaux militaires ou des juridictions spéciales”, a publié RSF.

Le site d’information en ligne le plus suivi du pays, CameroonWeb avait d’ailleurs été censurée pendant plusieurs mois avant d’être remise en ligne.

Il faut rappeler que depuis 2016, la crise anglophone menace le pouvoir de Paul Biya. Soutenus par certains activistes de la diaspora, les contestataires revendiquent de plus en plus clairement la sécession du pays. En 2017, l’internet a été coupé dans les régions contestataires du nord-ouest et du sud-ouest pendant plus de trois mois savants d’être rétabli.

Emmanuel Vitus est Google Policy Fellow et Chercheur auprès de Paradigm Initiative.

 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *